Tendances

Les podcasts contre-attaquent

Oubliez YouTube et les réseaux sociaux. Un peu vite expédié aux oubliettes du web, le podcast a réussi un come-back spectaculaire ces derniers mois. Libre et créatif, ce format déjà plébiscité par les auditeurs des grandes radios commence à sérieusement attirer les marques. On vous raconte pourquoi, dans le creux de l’oreille et en quatre points.

C’est quoi un podcast ?

Les Québécois préfèrent parler de « balados », les anglophiles de podcast, mais tout le monde parle au fond de la même chose : des contenus audios qu’on peut écouter sur son PC ou sa tablette, télécharger sur son smartphone grâce la foule d’applications dédiées… Les podcasts se divisent en deux grandes familles : les natifs, exclusivement produits pour une utilisation en ligne et les contenus de rattrapage. Équivalent des replays télévisés, ils permettent de récupérer des émissions diffusées sur les ondes de telle ou telle radio. Et ça marche du feu de Dieu. Les podcasts de réécoute de France Culture, par exemple, représentent de 13 à 15 % du volume d’écoute de la chaîne et France Inter a franchi la barre des 30 millions de téléchargements en octobre 2018. Pour tout Radio France, le nombre atteint 60 millions.

Pourquoi ça marche ?

Parce que c’est un mode de consommation de contenus intime, diffusé au creux de l’oreille, écoutable partout… Mieux : contrairement au texte et à la vidéo, le son n’exige pas une concentration totale et on peut conduire ou se balader sans interrompre l’écoute. Mais surtout, tout est permis. Si les podcasts de réécoute sont une simple rediffusion d’émission aux grilles traditionnelles, les natifs permettent de s’affranchir de tous les codes propres à la radio : la longueur est libre, les sujets aussi et le ton de même – un peu comme au moment de la légalisation des radios libres en 1981. Le tout permet à de nouveaux publics d’accéder à de nouveaux contenus, en passant parfois par des plateformes comme Binge Audio, clairement tournée vers les moins de 35 ans.

Aux contenus professionnels s’ajoutent les contenus amateurs. Comme à la grande époque des premiers blogs, n’importe qui peut produire de chez soi le contenu qui le tente pour un coût relativement réduit – un peu de matériel tout de même – pour peu qu’il maîtrise les bases du son et du montage. L’auditeur, lui, s’affranchit des horaires de diffusion et peut écouter où il veut et quand il veut son contenu préféré, y compris dans les zones blanches s’il a pris soin de le télécharger avant. Le podcast est devenu un mode d’écoute comme un autre : d’après un sondage de Médiamétrie, 4 millions de personnes écoutent régulièrement des podcasts. Et surtout, 81 % des podcasts téléchargés sont écoutés…

Mais ça va durer ?

Probablement, ne serait-ce que parque que le marché numérique donne de plus en plus de place au son. L’arrivée des assistants vocaux dans les salons fait qu’il ne se passe pas une semaine sans que des médias ne créent leurs propres contenus : « L’Equipe »  et « Les Echos » se sont récemment, lancés, alors qu’on ne les attendait pas nécessairement sur ce créneau. Les marques notamment s’y collent à leur tour, en particulier aux Etats-Unis où le marché du podcast connaît une croissance stratosphérique de 75 % par an depuis trois ans. En s’associant avec Slate, General Electric a par exemple décidé de travailler son image de marque en produisant The Message. De son côté, eBay valorise des portraits d’entrepreneurs avec Open for Business, un podcast tourné vers les retours d’expérience de dirigeant. Même une appli de… rencontres comme Tinder s’y colle avec DTR (« Define the Relationship ») qui prodigue des conseils de séduction adaptés à l’ère numérique. En France, une marque comme Orange utilise le podcast en com’ interne : dès 2016, ce format lui a servi à faire commenter les grandes orientations de son rapport annuel par des experts du secteur. Des sociétés spécialisées dans le brand content se multiplient comme Plink, un studio exclusivement dédié aux marques.

Il y a bien un hic ?

Oui : la mesure de l’audience et sa qualification. S’il est facile de mesurer le nombre de téléchargements, impossible en France de faire un compte précis du nombre d’écoutes en ligne sur les plateformes comme Deezer. Là où le streaming et la publicité sur le web permettent de mesurer avec précision l’impact d’une campagne en identifiant le sexe, l’âge et l’adresse d’un auditeur et, donc, de lui adresser une publicité ciblée avant ou pendant le contenu, le podcast en est loin. Pour l’instant, chacun en est réduit à des chiffres provenant de diverses sources, sans qu’un outil comme Médiamétrie ne vienne objectiver les résultats. Mais ce n’est qu’une question de temps…

Auteur


Jean-Christophe Piot

Jean-Christophe Piot

Consultant - Rédacteur partenaire